Le Vietnam est un carrefour, une charnière importante entre le monde chinois et le monde indien. De tout temps, ce sont les forces morales et spirituelles qui ont soutenu son peuple au cours de sa tragique histoire. Celles-ci puisent leurs sources dans le bouddhisme, le confucianisme et le taoïsme, qui imprègnent toujours pensée, moeurs et coutumes et que reflètent une littérature humaine et un art délicat, empli de sensibilité, du goût de la nature et de la richesse de l'esprit.
Le Bouddhisme
Le Bouddhisme est apparu au Vietnam autour du IIe siècle de l'ère chrétienne mais il ne devint religion officielle du pays qu'en 969 lorsque la philosophie prit un caractère de croyance populaire.
Selon le Bouddhisme, toutes les misères humaines sont nées de l'ignorance, ce qui nous conduit fatalement de désillusion en désillusion. L'ignorance engendre la passion et la soif de jouissances qui sont sources de douleur. Pour supprimer la douleur, il faut détruire l'ignorance, le désir et les passions. Chaque être doit purifier « cet amas d'écume » qu'est son corps, atteindre la perfection de la moralité en suivant le sentier de la vertu, de la sagesse, de la contemplation. Le fondateur du Bouddhisme est né à la frontière indo-népalaise vers la fin du VIe siècle avant notre ère. Sa mère, la reine Maya, le conçut en rêvant d'un éléphant blanc à six défenses. A l'âge de 29 ans, Siddharta Gautama ressentit le dégoût du monde, abandonna ses femmes, quitta le palais dans lequel il vivait luxueusement et décida de mener une vie d'ermite. Il lui fallut sept années de retraite, d'enseignement auprès des Sages pour comprendre le problème de la douleur et du désir. A la suite de « l'illumination », Bouddha parcourut l'Inde Gangétique pour prêcher sa doctrine, puis mourut à 80 ans, dans l'extinction du « nirvana ». Sa vie publique dura 45 ans mais il ne reste aucun écrit du Maître. L'enseignement du Bouddha fut énoncé, après sa mort, par ses disciples et est retracé dans les quarante deux livres du Tripitaka (en vietnamien Tam tang ou « triple corbeille »). Au début de notre ère, le Bouddhisme se divisa en deux grandes écoles : Hinayana (petit véhicule) ou culte des reliques et Mahayana (grand véhicule) de caractère philosophique qui ouvre une voie plus rapide pour ceux qui désirent atteindre la délivrance. Le Bouddhisme vietnamien appartient à cette dernière école.
On distingue deux degrés dans la vie religieuse : le culte pratiqué par les laïcs (adoration du Bouddha dans le temple, offrandes de fleurs et d'encens) tandis que les cérémonies sont réservées aux religieux qui vivent des dons et aumônes des laïcs. A la tête de l'église se trouvent un Patriarche et deux conseils, l'un consultatif, l'autre administratif. Le Bouddhisme Mahayana, bien qu'ésotérique, est devenu religion d'Etat au XIIe siècle, mais il dut souvent lutter contre le Confucianisme aux XIIIe et XIVe siècles. Il reprit vigueur au XXe siècle. Dans le Sud du Vietnam, les bonzes bouddhistes jouèrent un rôle important pendant la guerre en organisant une résistance pacifique à Ngô Dinh Diêm.
Le Taoïsme
Le Taoïsme est le frère cadet du Bouddhisme. Il prêche le culte du Tout, de l'Etre qui englobe à la fois le ciel, la terre et les étoiles. A quoi peut-on comparer la vie ? A une bulle d'eau qui se forme et disparaît' La méthode qui permet de comprendre la sagesse taoïste est le « non agir » (ou « wou wei »). Ses principes philosophiques furent souvent le domaine réservé des intellectuels. Le peuple avait surtout besoin de croire en un autre monde pour y trouver son salut ; ceci permit au Taoïsme de se transformer en un moyen d'atteindre le Ciel et d'être préservé par des génies immortels tout en combattant la mort. Fondé en Chine entre le Ve et le IIIe siècle avant notre ère, par Laozi (Lao Tseu), le Taoïsme est basé sur l'équilibre entre l'homme et le cosmos, tout en attachant une importance aux vies précédentes.
Le Confucianisme
Le Confucianisme est à la base, depuis vingt siècles, des institutions
sociales et familiales du Vietnam. Selon Confucius, l'homme ne peut exister en dehors de la communauté. Le Confucéen se doit de servir son roi, honorer ses parents, gérer sa famille. Nous savons peu de choses de Confucius : il serait né en 554 avant J.-C., il n'a écrit aucun ouvrage mais les témoignages de sa pensée sont retracés dans Le Livre des Entretiens, rédigé par ses disciples. Ce livre enseigne le perfectionnement de l'homme, les rites pour honorer ses parents, la manière de se comporter envers ses inférieurs et ses supérieurs, etc. Son enseignement traite uniquement des problèmes humains et se veut accessible à tous les hommes. Au Vietnam, le Confucianisme a été la doctrine officielle des concours de mandarinat. Le premier eut lieu sous la dynastie des Ly en 1075, le dernier concours prit fin en 1919.
Le culte des ancêtres
Le culte des ancêtres est ici, comme en Chine et au Japon, de la plus haute importance. L'homme possède deux groupes d'âmes dans son corps : trois âmes spirituelles et
sept âmes grossières (neuf chez la femme). A sa mort, les âmes se séparent du corps. Cette âme a besoin, pour ses transmigrations, des hommages, des prières et des sacrifices des survivants. Les principes vitaux ne disparaissent pas totalement à la mort, certains passent par « l'âme en soi » pour se fixer à la tablette funéraire ; d'autres restent attachés au cadavre ; certaines peuvent également errer. Ces âmes sont animées de bons sentiments, comme elles ont acquis des pouvoirs surnaturels et veillent sur le bonheur des vivants. On trouve pratiquement dans chaque maison vietnamienne, un petit autel sur lequel repose la table des ancêtres. De même, chaque village possède un temple des ancêtres qui contient les archives de chaque famille, représentées par les tablettes. Il est courant que bouddhistes ou catholiques pratiquent cet hommage. Le culte des ancêtres n'est pas incompatible avec la pratique d'autres religions ou philosophies. On le célèbre le premier jour de l'année (fête du Têt), le 3e jour du 3e mois, le 5e jour du 5e mois, le 15e jour du 8e mois et le 9e jour du 9e mois. Le culte est intense dans les cent premiers jours qui suivent la mort du défunt et les célébrations les plus solennelles prennent place au premier et second anniversaires du décès.
Le Christianisme
Le Christianisme a été diffusé par les missionnaires dominicains portugais,
vers le XVIe siècle. Ils s'installèrent d'abord à Malacca, puis se rendirent au Cambodge et au Sud-Vietnam. Après les Dominicains, vinrent les Jésuites. L'Eglise vietnamienne compte aujourd'hui près de quatre millions de fidèles et quarante-deux congrégations et ordres religieux.
Le Caodaïsme
Le Caodaïsme est né en 1926 lorsqu'un petit fonctionnaire nommé Ngô Van Chieû affirma être entré en communication avec un esprit s'appelant Cao Dai. Le Caodaïsme est basé sur la communication avec les esprits ; il se veut une réunification du Bouddhisme, du Taoïsme, du Confucianisme, du Christianisme,' Ainsi, les fidèles honorent Bouddha, Jésus Christ ou Mahomet mais également de plus insolites personnalités comme Victor Hugo, Jeanne d'Arc, Sun Yat Sen ou Churchill ! Le rituel se pratique quatre fois par jour au temple de Tay Ninh à une centaine de kilomètres de Saïgon. Le Caodaïsme actuellement rassemble deux millions d'adeptes.